Début juin 2018, la mairie de Paris a organisé un évènement festif: quatre jours de nature reconstituée et jetable pour un bilan carbone désastreux et un coût faramineux. Cette hypocrite leçon d’écologie a tout du greenwashing.

Le non-sens environnemental de l’évènement «Champ de Fleurs BiodiversiTerre» a été dénoncé par France Nature Environnement – Paris, fédération parisienne d’associations d’urbanisme et d’environnement dont SOS Paris est administrateur. Cet investissement municipal d’1,8 M€ aurait pu être utilement investi dans un projet durable. Rappelons l’aménagement «durablement» raté de la place de la République, en contradiction avec les objectifs des plans de résilience de la Ville de Paris, les plans Climat, Pluie, Biodiversité: imperméabilisation totale de l’espace, ruissellement des eaux, dallage bétonné non résistant et inadapté, arbres mourants de soif, maltraités et voués à être indéfiniment remplacés.

Greenwashing et contradictions municipales

La ville de Paris se déclare exemplaire en matière d’environnement. Mais exposer une moquette de verdure éphémère pour faire croire que Paris est une grande ferme à la campagne, tout en communicant sur son écoresponsabilité est d’un cynisme inacceptable, lorsque les sponsors ne sont autres que «Laviande», Association Nationale Interprofessionnelle du Bétail et des Viandes et «Happy Vallée», partenaire d’EuropaCity, ferme prétexte au bétonnage de 80 hectares de terres agricoles, qui participent directement au dérèglement climatique et à l’effondrement de la biodiversité. Pour FNE Paris, cette opération Champ de fleurs est symptomatique d’une planète considérée comme consommable, aux antipodes d’un mode de vie durable.

Place de la République : un aménagement urbain anti-environnemental

La place de la République, certes colonisée par la voiture, était jusqu’en 2013, riche- ment arborée avec 4 espaces végétalisés, un «écosystème» qui s’était maintenu sans encombre depuis plus d’un siècle. Réaménagée en site événementiel, elle est devenue une vaste zone de chantier récurrent où les arbres gênent et sont à terme condamnés. La circulation a bien été limitée mais l’espace intégralement cimenté.

Le projet initial supprimait tous les arbres. Un tollé populaire a permis de les conserver. 5 ans plus tard, presque tous les platanes d’origine ont dû être remplacés, victimes de l’imperméabilisation du sol. Les minuscules pieds d’arbres ne permettent pas à l’eau d’y pénétrer. Les grands arbres, tagués lors des manifestations sont si bien « nettoyés » au karcher par les services municipaux que leur écorce n’y survit pas, provoquant leur agonie. Le symbolique «Chêne du Souvenir», planté en mémoire des victimes des attentats n’a pas tenu, récemment remplacé par un sujet plus petit dans un bac de protection spécial. À défaut de l’ombre des grands arbres et des historiques fontaines aux Dauphins déplacées aux Champs Elysées, le “miroir d’eau” créé est un dispositif artificiel bien incapable de contrer l’îlot de chaleur que tout ce ciment sombre alimente.

Cette place de la République, transformée en lieu événementiel moderne est devenue un site hostile à la nature, hypothéquant gravement l’avènement d’un futur durable et souhaitable. FNE Paris demande à la ville que les prochains projets d’aménagement d’espaces publics ou de places (Bastille, Fêtes, Gambetta, Italie, Madeleine, Panthéon ou Nation qui a déjà commencé à abattre ses arbres…) conservent les arbres existants, développent des espaces verts en pleine terre et imposent des sols stabilisés et drainants plutôt que l’imperméabilisation systématique actuelle. Elle rappelle le rôle irremplaçable de la nature et des arbres dans les processus de résilience des villes. Les arbres sont nos meilleurs alliés face aux défis environnementaux liés au changement climatique, mais il faut pour cela respecter leurs impératifs biologiques. FNE Paris oppose à un projet éphémère et racoleur de végétalisation factice, une revendication d’aménagements urbains vertueux, développant les conditions d’une ville renaturée et véritablement résiliente.

Christine Nedelec