Un important projet d’urbanisme va voir le jour dans le 14e arrondissement sur le site de l’ancien hôpital Saint-Vincent-de-Paul, au cœur de Montparnasse. Apparemment, aucune leçon n’a été tirée de la réalisation, dans les années 60 et 70, de ghettos urbains dont on mesure pourtant, jusqu’à aujourd’hui, les effets dévastateurs. C’est ce qu’on pourrait penser à la vue de l’actuel projet d’urbanisme sur ce site. Cette vaste parcelle désaffectée est l’une des dernières, à Paris, offrant la possibilité de réaliser un nouveau quartier innovant et ambitieux. La Municipalité annonce vouloir bâtir « un éco-quartier exemplaire et ouvert sur la ville ». Elle se dirige cependant tout droit vers la création d’une de ces « cités » qui font régulièrement la « une » des pages de faits divers. Le programme prévoit la construction d’un nouveau quartier de 600 logements (environ 2000 habitants), dont 300 logements sociaux, activités, école, équipements et services publics, sur une surface de 60 000 m². Le projet urbain retenu par la Ville se répartit sur quatre grands « monoblocs » de sept à dix étages chacun, à la fois trop hauts et trop proches pour permettre un ensoleillement suffisant. Les anciennes « rues », plantées de l’hôpital formeront les seuls espaces publics, soit 4 000 m² à peine, sur un site de 34 000 m² !
Fermé sur lui-même, cet ensemble le sera également vis-à-vis de la ville par le front bâti sur l’avenue Denfert-Rochereau qui sera conservé dans sa quasi-totalité. On sait désormais que pour être durable, dans tous les sens du terme, un projet urbain se doit de favoriser les liens et les échanges humains, économiques, environnementaux… A contrario, l’urbanisme ici proposé d’un lotissement compact et enclavé, renfermant sur lui-même l’espace autant que ceux qui y vivent, au lieu de l’ouvrir et le décloisonner. D’autres solutions sont possibles : ouvrir le site sur l’avenue Denfert-Rochereau et lui apporter animation et attractivité ; augmenter sensiblement la surface des espaces plantés privés, mais surtout publics ; enrichir la biodiversité de ce grand îlot du 14e ; répartir la densité et les hauteurs des bâtiments en privilégiant ensoleillement ; respect des vis-à-vis et des espaces entre les immeubles et enfin préserver de façon irreversible , un vaste espace de respiration central formé de places, de jardins, de lieux de rencontre, incitatif de vie sociale, de détente et de projets partagés, qui favorisera la mixité et le vivre-ensemble. Bref, de réaliser véritablement, comme annoncé, un éco-quartier innovant, exemplaire et ouvert à toute évolution. Il n’est pas trop tard pour réagir. Devant les dangers avérés du projet actuel, il faut ouvrir à nouveau la réflexion. Sans remettre en cause le programme dans son ensemble , nous demandons aux opérateurs en charge du réaménagement du site Saint-Vincent-de-Paul d’organiser une confrontation d’idées et d’ouvrir un débat public associant professionnels, élus et habitants.Une telle confrontation permettra de choisir en toute transparence, dans l’intérêt de tous, l’avenir et le caractère « durable »de ce nouveau quartier.
Nicolas Gusdorf
Président de l’Association pour le Quartier Saint-Vincent-de-Paul – AQSVP