Depuis le 15 avril 2019, date du grave incendie intervenu à Notre-Dame de Paris, les médias ont beaucoup évoqué les pertes définitives (la charpente et la flèche notamment) et les perspectives de consolidation, puis de restauration de cette cathédrale emblématique. Après l’émotion dont nous avons fait part dans notre numéro précédent, et l’évocation des projets de restauration de cet édifice remarquable, nous souhaitons faire un point de la situation actuelle.

Le constat

Ce qui a été très endommagé ou a même disparu, ce sont : les grandes charpentes, la toiture haute, la flèche et quelques parties des voûtes (à noter que le coq de la flèche, contenant des reliques a été retrouvé dans les décombres). La cathédrale reste fragile et elle n’est pas entièrement stabilisée, certains murs ayant bougé de quelques centimètres. Ainsi, les froids de l’hiver pourraient avoir des conséquences dramatiques.

D’ores et déjà, bien heureusement, des travaux de consolidation des voûtes et des arcs-boutants ont été entrepris (par étais, cintres…). En outre, une couverture provisoire de l’édifice a été réalisée. Trente-neuf entreprises seraient sur le chantier regroupant plus de 80 compagnons. Cependant, le chantier de nettoyage et consolidation a pris du retard pendant l’été à cause d’une alerte au plomb. À ce jour, cependant, 80% au moins, des gravois auraient été évacués (souvent grâce à des robots) pour être analysés. Par précaution, les vitraux les plus exposés ont été démontés pour être restaurés.

Cependant, la phase de sécurisation ne sera terminée que lorsque l’ancien échafaudage (installé pour la restauration de la flèche !) aura été démonté. Or, il a beaucoup souffert -éléments fondus et entremêlés- et il devra être préalablement « ceinturé ». Partant de là, les diagnostics réels ne pourront être établis qu’après cette phase de démontage dudit échafaudage. Dans l’intervalle, des capteurs ont été installés pour surveiller la solidité de l’édifice. Notons aussi que le périmètre de sécurité autour de la cathédrale a nui aux commerces des alentours. Quant à l’enquête judiciaire, elle n’a rien révélé de très significatif, pour l’instant; peut-être faut-il encore attendre.

Notre-Dame de Paris vue depuis les échafaudages.

Les diagnostics et la restauration

Après que la cathédrale aura été « soignée », elle pourra être restaurée, en fonction des diagnostics établis. Ces diagnostics sont attendus pour le printemps 2020, soit après le démontage de l’échafaudage existant, comme nous l’avons indiqué. Ensuite, les consultations d’entreprises pourront commencer, en espérant un démarrage des travaux de restauration en 2021. Bien entendu, seules les entreprises ayant la qualité « Monuments Historiques » devraient être habilitées à travailler sur un chantier aussi délicat.

En ce qui concerne la charpente, la filière « bois » semble privilégiée (il est vrai par exemple que la charpente en béton de la cathédrale de Reims n’est pas très jolie…). Une incertitude plane encore à propos de la flèche ; nous considérons, quant à nous, que ce n’est pas la plus grande urgence, tout en militant, comme beaucoup, pour une reconstruction à l’identique, comme précédemment exposé. À propos des grandes options -charpente, flèche-, une consultation publique serait d’ailleurs envisagée, sans savoir dans quelles conditions. Pour nous, l’essentiel, c’est le respect du code du patrimoine, de la charte de Venise et des éventuelles injonctions de l’UNESCO pour ce site classé. Nous signalerons en revanche, que la loi votée en juillet 2019 pour la restauration et la conservation de Notre-Dame de Paris a été jugée inutile par l’opposition parlementaire.

Notons que les statues des apôtres qui entouraient la flèche -et qui avaient heureusement été retirées peu avant l’incendie en vue de leur restauration- sont déjà en cours de remise en état à Périgueux. Quant au grand orgue, peu endommagé mais surtout empoussiéré, il sera restauré. Par ailleurs, le problème de la destination du parvis et celui de l’Hôtel Dieu, voisin, n’est pas vraiment réglé ; nous ne pouvons qu’espérer que ce ne sont pas les marchands du temple qui s’y installeront. Dans l’immédiat, d’ailleurs, le recteur de la cathédrale, monseigneur Patrick Chauvet demande que, dès que cela sera possible, un espace du parvis soit utilisé comme espace de prière, la demande étant forte.

Enfin, il faut espérer que le chantier, sans être accessible pour autant au grand public, soit une véritable occasion d’une communication forte et pédagogique.

Le financement

Depuis le mois d’avril, les promesses de dons ont été très nombreuses ; elles atteindraient plus de 900 millions d’euros à ce jour dont 600 millions auraient été libérés (dont 85 millions déjà utilisés pour les premiers travaux urgents). Il est établi, par ailleurs que les grands mécènes passent des conventions et libèrent leurs fonds au fur et à mesure de l’avancement des travaux. Quant aux collecteurs de fonds retenus, ce sont la Fondation Notre-Dame, la Fondation Avenir du Patrimoine à Paris (abritée par la Fondation Notre-Dame) la Fondation du Patrimoine et la Fondation de France, ce à quoi il faut ajouter une fondation étrangère, la Fondation Friends of Notre-Dame de Paris (qui avait déjà été sollicitée pour la restauration de la flèche !).

Conclusion

Comme nous l’avons indiqué précédemment, il est probable que la cathédrale de Paris sera présentable en 2024, sans pour autant que les travaux soient terminés. L’important est que la réflexion conjointe des architectes, des historiens et des hommes d’église, menée avec toute la sérénité qui s’impose en une telle circonstance, aboutisse à un projet de transmission aux générations futures d’une cathédrale fidèle à ce qu’elle a été depuis plus de 800 ans.

Régis de Savignac