Participez à l’enquête publique de la mairie de Paris avant le 17 novembre 2021
👉 https://www.enquetes-publiques.com/Enquetes_WEB/FR/EP21037/Deposer.awp
 
Nous nous concentrons ici sur le Champ-de-Mars, mais sa transformation s’inscrit dans le projet “Grand Site Tour Eiffel”, mené par la Ville de Paris et qui entend remanier également, en profondeur, le Trocadéro et l’axe Bir Hakeim – Quai Branly. La présentation officielle : https://www.enquetes-publiques.com/Enquetes_WEB/FR/EP21037/Dossier.awp

Communication truquée, comme d’habitude

À grand renfort de visuels avantageux, pour la plupart irréalistes, la communication officielle met en avant, comme toujours, des objectifs louables, tels que la végétalisation. Mais les intentions cachées sont autres : privatisation, bétonnisation et aménagements permettant une exploitation évènementielle intensive. Et ce sont les patrimoines naturel et architectural qui en pâtissent.
 

La Société d’Exploitation de la Tour Eiffel s’approprie le parc

Ils avaient voulu nous faire croire que le vilain mur de verre et de métal construit en 2018, ceignant la tour, bloquant son accès et gâchant sa vue, était là pour éviter le risque terroriste. Mais curieusement, on n’a pas jugé nécessaire de construire un mur autour de Notre-Dame et de son parvis qui accueillent pourtant en temps normal deux fois plus de visiteurs par an que la Tour Eiffel… Il apparaît désormais évident qu’il s’agissait d’un mensonge et que le mur, excluant les simples promeneurs, captant et contrôlant les flux de visiteurs payants, transformant par conséquence les allées et espaces alentour en zone tampon, était une pure privatisation d’environ un quart du Champ-de-Mars par la Société d’Exploitation de la Tour Eiffel (SETE) avec comme objectif d’optimiser l’exploitation commerciale de la tour. D’ailleurs, c’est simple, toute cette surface n’est plus considérée comme faisant partie du Champ-de-Mars dans la présentation du projet.
 

Privatisation de l’espace public et projet immobilier

Mais dans ce nouveau projet, la SETE va encore beaucoup plus loin. Elle veut désormais des bureaux in situ. Et pour ce caprice égoïste, elle a décidé d’artificialiser les sols des jardins latéraux, probablement les plus beaux du Champ-de-Mars, car c’est là qu’elle compte se les faire construire ! Deux bâtiments semi-enterrés, déguisés avec des toitures végétalisées, évidemment comptées comme création d’espaces verts, s’approprient donc certains angles de vue sur les pieds de la tour. À l’extérieur du mur d’enceinte, également à construire à la place des pelouses des jardins, deux autres grands bâtiments doivent servir officiellement de bagageries… Le Champ-de-Mars devient donc un vestiaire. Mais certains visuels montrent que ces bâtiments serviraient aussi de café… En plus de ces quatre nouvelles constructions, plusieurs dizaines de kiosques et guérites, au design moderne, particulièrement massifs, pullulent sur tout le périmètre et doivent offrir de “nouveaux services” : essentiellement des commerces. Ils ont le fâcheux défaut de bloquer la vue sur la tour, d’un peu partout ! Pendant 130 ans, la Tour Eiffel s’est très bien passée de toutes ces emprises prévues. Il faut accepter que ce monument du 19e siècle a une capacité limite d’accueil. Tout bétonner, tout artificialiser, détourner l’usage du parc, pour toujours aspirer plus de touristes et maximiser les profits n’est pas acceptable.
 

Convertir définitivement le parc à l’évènementiel

Après les expositions universelles, le Champ-de-Mars a été consacré et aménagé en parc au début du 20e siècle. C’est essentiellement un lieu de promenade et de repos. Il est néanmoins dans sa vocation d’accueillir ponctuellement de grands évènements, comme le feu d’artifice du 14 juillet, et quelques autres. Mais de plus en plus, depuis de nombreuses années, les évènements (qui ne s’adressent pas toujours au plus grand nombre, qui sont même parfois réservés aux happy few) s’y enchaînent de façon quasi incessante, bien au-delà du raisonnable, privant les Parisiens de portions plus ou moins grandes du parc, dans une ville déjà extrêmement carencée en espaces verts. Le pompon est bien entendu le squat pendant cinq ans par le Grand Palais. Chaque évènement nécessite une période de montage et de démontage qui est souvent bien plus longue que l’évènement lui-même et dont les chantiers sont une grande source de nuisance. Le nouveau projet prépare littéralement le terrain pour une pérennisation de l’exploitation évènementielle du parc. La place Joffre voit ainsi ses deux grandes belles fontaines détruites, car en relief, et son sol en stabilisé est entièrement minéralisé. L’élégante fontaine de la place Jacques Rueff, au centre du parc, est elle aussi détruite pour laisser place à un espace plat et minéral. Les allées latérales du parc sont, elles, carrément bétonnées pour être carrossables. Et les grandes pelouses centrales, rétrécies, deviennent “techniques”, c’est-à-dire dédiées à un usage intensif.
 

Adieu style Belle Époque

En 2015, la Ville présentait son plan de réaménagement des grandes places parisiennes. Nous connaissons le résultat places du Panthéon, de la République, de la Nation et de la Bastille. Systématiquement le décor classique a disparu pour être remplacé par un mobilier contemporain, disgracieux, en rupture avec l’histoire de la ville. Le style Belle Époque, la signature de Paris, qui a participé à son rayonnement, semble même être la cible toute particulière des urbanistes actuels. Le Champ-de-Mars est un parc de la Belle Époque (avec quelques ajouts Art déco localisés). Ce style s’exprime à travers son tracé, son mobilier (bancs, réverbères, signalétiques, édicules, fontaines, clôtures, théâtre de marionnette, etc.) et les paysages ainsi créés. Le projet annonce vouloir ménager une partie de ce patrimoine, sans qu’on sache très bien dans quelle proportion. On sait d’ores et déjà qu’une partie sera détruite, comme les grandes fontaines. On voit aussi que les nouvelles places minérales et les nouveaux plans d’eau auront un design très contemporain. On voit également que les nouveaux bâtiments, les très nombreux kiosques, au design en totale rupture, de nouveaux luminaires et tout un nouveau mobilier vont mailler et donc défigurer le décor classique. D’autant que ce nouveau mobilier, particulièrement massifs, aux formes carrées et de couleur marron est en contraste total avec le décor de nature. Alors que le mobilier classique, vert anglais, aux formes fines et gracieuses, a été conçu pour se fondre discrètement dans la verdure… D’ailleurs, ce dernier doit être repeint en “vert de Seine”, soit un caca d’oie pour le rapprocher du premier. Le projet néglige de préciser le sort des beaux vases Médicis, actuellement en ruine. Il est à craindre qu’ils soient supprimés.
 

Destruction de nature

La ville avait annoncé vouloir faire du site Tour Eiffel un “poumon vert”. Derrière la communication verte, on a vu plus haut qu’en ce qui concerne le Champ-de-Mars (qui est déjà un poumon vert), les aménagement vont au contraire détruire et réduire la place de la nature : artificialisation des sols, des sous-sols, constructions et minéralisation, coté Tour Eiffel, au centre (place Jacques Rueff), côté École Militaire, dans les allées latérales ; réduction des pelouses, abattage des 36 buis en cône et de 25 arbres. On rappelle que le Champ-de-Mars a déjà subit une énorme dose de bétonnage en surface et en profondeur l’an dernier (https://www.sosparis.org/2020/07/19/le-champ-de-mars-et-les-pieds-de-la-tour-eiffel-engloutis-sous-le-beton/).
 

Ce que nous demandons

Parcs et jardins ne sont plus envisagés comme des lieux de promenade et de détente pour les Parisiens mais comme des espaces multifonctionnels offert aux promoteurs et au surtourisme. Tout est fait pour faciliter la logistique des événements organisés, inciter les visiteurs occasionnels à consommer et rien n’est prévu pour les habitants, pourtant les premiers concernés. Ce projet au budget pharaonique ne correspond ni aux besoins des Parisiens ni à celui des touristes qui veulent voir un Champ-de-Mars authentique. Le seul aménagement nécessaire est celui des commodités, l’offre actuelle étant indigne. Ce grand et beau parc, très dégradé par des années de surexploitation et de négligences, ne doit pas être transformé. Il doit être restauré et bénéficier d’un entretien régulier. Le programme évènementiel doit, lui, être fortement revu à la baisse.
 
Participez à l’enquête publique avant le 17 novembre et dites non à ce projet de massacre patrimonial, de détournement de l’usage d’espaces verts, de privatisation de l’espace public, de fausse écologie et de vraie bétonnisation qu’est le projet “Grand Site Tour Eiffel” : https://www.enquetes-publiques.com/Enquetes_WEB/FR/EP21037/Deposer.awp
 
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Pour compléter

Les Amis du Champ-de-Mars dénoncent eux aussi ce projet. Des explications complémentaires sur leur site : http://www.amisduchampdemars.fr/
Leur série de vidéos sur le projet :
– Champ-de-Mars : Comprendre pour mieux protéger https://youtu.be/GPJ586rFua0
– La réduction annoncée des espaces verts https://youtu.be/vHhIofu55iw
– Une perspective à la française https://youtu.be/oCZQOqK5f4U
– De l’importance des rues traversantes https://youtu.be/SKBjJNCCs7w
– Champ-de-Mars, quel budget ? https://youtu.be/M0tbrI3kZRc
– Faut-il restaurer la Tour Eiffel? https://youtu.be/U5CFGGSMY7Y