Marthe de Rohan-Chabot, fondatrice de SOS Paris, a rendu hommage à Olivier de Monicault pour ses douze années de présidence de l’association.

«Pour les nouveaux venus qui ne me connaissent pas, je précise que je représente ici aujourd’hui le petit groupe qui, en 1973, a pris l’initiative de créer SOS Paris. En tant que fondatrice et mémoire de l’association et au nom de nos adhérents, je voudrais remercier aujourd’hui au nom de tous, Olivier de Monicault qui a été notre Président de 2004 à 2018. Il a souhaité cette année se voir déchargé de sa lourde tâche à la tête de l’association. C’est à son amour désintéressé de Paris, à l’ardeur qu’il a mis à le défendre que nous devons la continuité et la notoriété de SOS Paris.

Cher Olivier,

Lorsque nous t’avons proposé la Présidence de SOS Paris, tu venais de terminer une brillante carrière professionnelle et tu étais déjà sollicité par différents organismes désireux de te confier d’importantes responsabilités. Tu avais, avec tes six enfants, une vie familiale déjà passablement remplie et aussi une belle demeure Renaissance, un petit joyau du patrimoine architectural normand à entretenir et à mettre en valeur. Nous étions donc conscients du précieux cadeau de temps et d’énergie qui t’était demandé pour mener à bien la poursuite des objectifs de SOS Paris, tâche rendue d’autant plus difficile que tu arrivais à un moment où différentes orientations étaient à l’étude, une redéfinition des missions de l’association étant devenue nécessaire.

Dans les années 90, l’urgente priorité de l’association avait été la protection des sites sensibles du cœur de Paris sans cesse menacés par de puissants lobbys capables de détourner à leur profit les fragiles mesures de protection censées s’opposer à leur avidité. Sous l’impulsion de Philippe Denis et de Louis Goupy, l’objectif de SOS Paris avait été d’obtenir un renforcement et une réelle application des mesures de protection: élargissement du patrimoine historique classé, extension des sites protégés, limitation du nombre des ZAC et priorité donnée aux opérations de réhabilitation, recensement et sauvegarde des espaces verts menacés, abandon de parcs de stationnement, application effective des périmètres de protection aux abords des Monuments Historiques.

Tu as poursuivi cet effort visant à stabiliser le cœur du Paris historique avec la même vigilance. Tu l’as personnellement assuré au sein de la Commission des sites et de celle du Vieux Paris où tu nous représentes. Sous ton impulsion, le bulletin a été considérablement étoffé et modernisé. Tu as fait appel au talent de notre Vice-Président, Jan Wyers, photographe enthousiaste et infatigable de Paris auquel tu as laissé « carte blanche » pour en assurer une illustration vivante et inventive.

Cependant, en 2004, année où tu as pris la présidence de SOS Paris, l’association se trouvait confrontée à de nouveaux défis. Des projets voyaient le jour qui concernaient cette fois le Paris de demain et rappelaient par leur ampleur les aberrations de l’ère pompidolienne.

Aux portes de Paris, des quartiers entiers témoins des ensembles architecturaux homogènes des quartiers périphériques étaient condamnés à disparaître, sacrifiés à l’ivresse constructiviste des bâtisseurs. L’urgente priorité de SOS Paris était maintenant de s’opposer à la tentation d’un retour au gigantisme, aux tours, à la confiscation des espaces verts et des lieux de respiration au profit de grands équipements de prestige.

Tu as eu le grand mérite de repenser la stratégie de l’association. Les moyens à mettre en œuvre reposaient cette fois sur l’information et la mobilisation des Parisiens. Sous ton impulsion, notre Secrétaire Générale, Christine Nedelec, s’est vue confier la mission de resserrer nos liens avec le réseau très actif des associations parisiennes, le but visé étant d’obtenir une coopération de tous les organismes qui, depuis des années, réclament la mise en place d’une véritable concertation en matière d’urbanisme. Des manifestations ont été organisées sur les sites menacés – celui de la Tour Triangle notamment – dont les médias français, mais aussi la presse étrangère, se sont fait l’écho. Des recours contre les permis de construire accordés à des équipements contestés ont été menés conjointement par SOS Paris et les associations riveraines.

Merci, cher Olivier, de la tâche accomplie. Au cours des quatorze années de ta présidence, tu as su assurer avec discernement la double mission de l’association : protéger le Paris des siècles passés, peser sur les décisions dont dépendra le Paris de demain. Tu laisses à ton successeur, Thierry Marcus, une feuille de route que vous avez élaborée ensemble et qui est remarquablement détaillée dans votre éditorial commun du dernier bulletin. Tu lui laisses aussi une équipe soudée, prête à affronter les futurs combats ».

Marthe de Rohan Chabot